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    A la tête de l'Egypte depuis 1954, le colonel Gamal Abdel Nasser rêve de moderniser son pays. Il veut commencer par construire un immense barrage, en amont du Nil, pour réguler le débit du fleuve, multiplier les surfaces irriguées et fournir de l'électricité à sa population. Le coût de ce barrage, à Assouan, est exorbitant mais les USA et la Banque mondiale lui prêtent les fonds nécessaires. Dans le même temps, Nasser envisage d'anéantir Israël et se fait livrer, en 1955, des armes soviétiques depuis la Tchécoslovaquie. Il n'en faut pas plus pour inquiéter le Sénat américain qui retire son offre de prêt, suivi par la Banque mondiale et même les Soviétiques.

    C'est une humiliation pour ce jeune Président qui décide de se procurer l'argent en nationalisant le canal de Suez, construit par le Français Ferdinand de Lesseps, et en réaffectant les fonds perçus à la construction du barrage du siècle. Sans doute, a-t-il été influencé par la nationalisation récente des pétroles iraniens par Mossadegh ou incité à le faire par une suggestion américaine. Le 26 Juillet 1956, après s'être assuré du retrait, par accord, des troupes britanniques occupant la zone du canal, il prononce un discours ferme et nationaliste à Alexandrie. « Ce canal est la propriété de l'Egypte ... » puis, ponctuant ses phrases par plusieurs évocations à de Lesseps ( mots codes à ses hommes de main ) «  ... à cette minute même, des fils de l'Egypte assurent le contrôle de la Compagnie du canal de Suez, de ses installations et de la direction du trafic ». Il coule ensuite des bateaux dans le canal pour bien montrer sa détermination et entraver la circulation.

    Le canal de Suez évite aux navires de faire le tour de l'Afrique pour convoyer des marchandises de l'Asie vers l'Europe, et inversement. Son importance est donc primordiale pour les occidentaux qui l'exploitent et commercent avec les Indes, le Moyen-Orient et l'Asie. Sa liberté d'accès l'est tout autant pour les Israéliens qui ont vu Nasser bloquer le golfe d'Aqaba à plusieurs reprises.

    Cette nationalisation surprise provoque donc une crise dans les chancelleries. En France, où l'on voit d'un mauvais œil le soutien égyptien à la rébellion du FLN algérien, Guy Mollet, appuyé par le ministre de la Défense et celui de la Justice, François Mitterrand, mais contre l'avis de Pierre Mendès France, se rallie à l'idée d'une guerre préventive. En Angleterre, le Premier ministre, Anthony Eden, peine aussi à convaincre, contre Neville Chamberlain, de la nécessité d'une démonstration de force contre le « Mussolini du Nil ». Pour Israël, qui n'a que la France comme allié, c'est une occasion de faire stopper les raids croissants des Fedayins, les combattants palestiniens poussés par l'Egypte. Les Etats-Unis temporisent.

    Une réunion secrète, à trois, entre Français, Britanniques et Israéliens, se tient à Sèvres, le 22 Octobre 1956, au cours de laquelle il est décidé que Israël mènerait une attaque surprise en direction du canal, provoquant ainsi la montée au front des troupes arabes et que les gouvernements français et anglais imposeraient un ultimatum aux deux belligérants pour qu'ils se retirent à 10 miles de la zone du canal. Nasser refusera l'ultimatum ( c'est ce qu'on avait prévu à Sèvres ), ce qui autorisera les troupes franco-britanniques à bombarder les installations d'aviation égyptiennes et de larguer des parachutistes sur Port Saïd et de part et d'autre du Nil. Le plan marcha à merveille et les positions furent facilement réoccupées le 06 Novembre.

    Cependant, Russes et Américains, écartés des préparatifs de cette intervention, n'entendent pas la laisser se dérouler sans qu'ils en tirent profit. Le Maréchal Boulganine menace aussitôt de lancer des fusées nucléaires si l'attaque n'est pas stoppée et le Président Dwight Eisenhower exige, lui aussi, un cessez-le-feu. Pour forcer la main aux Britanniques, qui ont agi sans les avertir, les Américains lancent une attaque monétaire contre la Livre sterling et envoient leurs forces aéronavales en Méditerranée. Les Anglais cèdent et, par contrecoup, les Français. Bien que vainqueurs, leurs troupes doivent se replier et quitter le pays. Une force internationale, sous l'égide de l'ONU, la première apparition des casques bleus, s'installera sur la ligne d'armistice et les Nations Unies condamneront l'action franco-britannique.

    Nasser exulte. Sa défaite militaire prend des allures de triomphe diplomatique. Les deux puissances européennes, puissances coloniales déchues, subissent une grave perte de prestige pendant que deux autres puissances, américaine et soviétique, réaffirment leur suprématie. Nasser, devenu le héraut du panarabisme, gouvernera l'Egypte jusqu'à sa mort, à 52 ans, le 28 Septembre 1970.

    Une page est définitivement tournée, celle de la « diplomatie de la canonnière » qui annonce l'heure de la décolonisation dans toute l'Afrique et au-delà. Le Proche-Orient deviendra un enjeu durable dans la lutte que se mèneront les nouvelles puissances du monde bipolarisé jusqu'à la chute du mur de Berlin en 1989.

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    Au moment où la carte territoriale des nouvelles implantations militaires vient d'être dévoilée par le Premier ministre, le plan Vigipirate, lui, n'est pas remis en cause. On s'est habitué à ces patrouilles mais nul ne saurait dire quelle part leur présence a joué dans le fait que notre pays semble épargné par les attentats terroristes, à l'inverse des Etats-Unis, de l'Angleterre ou de l'Espagne.

    Pourtant, la terreur a déjà envahi la capitale française il y a un peu plus de 10 ans, liée sans doute à la politique extérieure de la France. Une vague d'attentats va frapper le pays en 1995 où, chaque fois, on trouvera la trace d'un jeune Algérien, dont la famille s'était installée à Vaulx-en-Velin et qui est manipulé par le GIA, Groupe Islamique Armé, lié au FIS frustré après des élections gagnées. La branche djazariste du GIA veut remplacer le gouvernement algérien par un Etat islamiste mais la branche salafiste, qui approche Khaled Kelkal, notre homme, veut organiser une révolution islamique mondiale.

    Après des études sans problème à Lyon, Khaled sombre dans la délinquance, est arrêté pour vols et braquages et fait son éducation au radicalisme arabe auprès de religieux islamiques, qui meublent ses journées de prison. A sa sortie, en 1992, il est aussitôt intégré dans des réseaux de livraison d'armes en Algérie. Il ne fut sans doute pas difficile de le convaincre d'effectuer des attentats en France.

    L'été 1995 sera son point d'orgue. XVIIIème arrondissement, le 11 Juillet, il assassine l'imam Sahraoui dans une mosquée. Lyon Bron, le 15 Juillet, il participe à une fusillade contre des gendarmes. RER B, station Saint Michel, le 25 Juillet, son plus gros coup, il est impliqué avec Boualem Bensaïd, dans l'explosion d'une bombonne de gaz remplie de clous, faisant 4 morts et 117 blessés. Place de l'Etoile, le 17 Août, il est encore là pour l'attentat à la bombe qui blesse 17 personnes. Le 26 Août, il est toujours impliqué dans l'attentat contre la ligne TGV Paris-Lyon. Mais, cette fois, la bombe n'explose pas et ses empreintes digitales sont relevées. Dès lors, il est reconnu, placardé sur tous les murs de police et recherché comme « l'ennemi public numéro 1 ». Malgré la traque dont il fait l'objet, Kelkal réussit à commettre encore deux autres attentats avant d'être abattu. Le 03 Septembre, une bombe dans un square parisien, boulevard Richard Lenoir, fait 4 blessés et le 07 Septembre, une autre explose dans une voiture devant l'école juive de Villeurbanne, faisant 14 blessés.

    Ces attentats, et en particulier celui du RER à Saint Michel, ont été revendiqués par le GIA. On cite le nom de Rachid Ramda, protégé de l'émir du GIA, Djamel Zitouni, quand on évoque le cerveau et le financier de ces actions, orchestrées depuis Londres. Mais le terreau des banlieues difficiles, aux abords des grandes villes françaises, leur a fourni la main d'œuvre. Des bandes de petits trafiquants passent ainsi insensiblement de la délinquance classique au djihad, reportant dans leur pays d'adoption l'exacerbation des foules fanatisées du Moyen Orient qu'ils observent à la télévision. Ramda et Bensaïd seront condamnés à perpétuité.

    Des ramasseurs de champignons dans la forêt de Marval, le 27 Septembre 1995, signalent aux gendarmes « deux campeurs sauvages » que ceux-ci ont tôt fait de retrouver. Ils sont accueillis par des tirs de fusil Winchester à pompe. Kelkal peut s'enfuir mais deux jours après, il est repéré à un abri de bus par une patrouille de l'EPIGN. Blessé à la jambe, il brandit son pistolet 7,65 mais ne peut s'en servir avant la riposte des gendarmes. Il est tué sur le coup.

    Le GIA sera à peine touché par cette perte et, tel le phoenix, renaîtra pour enlever et exécuter, en 1996, les 07 moines trappistes français de Tibhirine en Algérie, encore que cette responsabilité soit aujourd'hui contestée. La France reste vigilante face à cette menace diffuse qui peut frapper aveuglément n'importe quand. On se souvient de l'arraisonnement de l'avion d'Air France, en 1994, sur l'aéroport de Marseille où le GIGN put anéantir les velléités du commando qui voulait projeter l'avion bourré de carburant sur la Tour Eiffel.

    Toute parole de nos dirigeants, inappropriée ou perçue comme un outrage par certains fanatiques, peut immédiatement trouver son prolongement dans une action suicide meurtrière pour une foule d'innocents, action qui, aux yeux des auteurs, lave leur honneur et leur ouvre les portes du paradis. On espère que les chefs qui nous gouvernent ont bien cette pensée en tête dans leurs discours diplomatiques.

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    Plus encore que John F. Kennedy ( Ich bin ein Berliner ), le Général de Gaulle avait l'art consommé des petites phrases et des effets de style. Ses mots ont toujours été réfléchis et choisis à dessein. On se souvient du « Je vous ai compris » prononcé le 04 Juin 1958, au balcon de l'hôtel de ville d'Alger.

    Au Canada, dans la « belle Province » du Québec, une autre petite phrase va faire l'effet d'une bombe, en 1967. C'est l'année du centenaire de la Confédération canadienne et de Gaulle sait qu'il sera invité mais il pense que les Français sont là-bas des citoyens de seconde zone, les vassaux de la reine d'Angleterre, ce qui lui est insupportable. Il veut se rendre au Québec et trouve le prétexte de l'invitation de Daniel Johnson, Premier ministre du Québec, qui le prie à l'Exposition universelle de Montréal. Le Général hésite car une foire n'est pas le meilleur endroit pour faire un coup politique mais s'y rend finalement avec, rapporte Alain Peyrefitte, l'idée suivante en tête : « Nous n'irons pas fêter à Montréal le centenaire de la Confédération canadienne, comme le voudraient les Anglais du Canada et les fédéraux. Si nous y allons, ce sera pour fêter 200 ans de fidélité des Canadiens français à la France ».

    C'est à bord du Colbert, navire-amiral de la flotte de l'Atlantique, et non pas en avion ( qui l'aurait obligé à se poser à Ottawa ) que de Gaulle fait la traversée de l'océan. Après une escale française à Saint-Pierre-et-Miquelon, il confie au colonel Desgrées du Lou, l'un des aides de camp « On va m'entendre là-bas. Je vais en surprendre plus d'un ... ». Le 23 Juillet, le Colbert mouille au pied de la citadelle de Québec où Daniel Johnson et le Gouverneur général du Canada accueillent un Charles de Gaulle en tenue de général. La foule se tait au « God save the Queen » mais chante « La Marseillaise » à pleins poumons. Le ton du séjour est donné.

    Après la ville de Québec, de Gaulle entreprend le lendemain, 24 Juillet 1967, son voyage vers Montréal en suivant le « Chemin du Roy », sur la rive Nord du fleuve Saint-Laurent en passant par Trois-Rivières. Tout le long, la foule est nombreuse et brandit des pancartes « Québec libre » à chaque arrêt. Les discours du général s'animent au fur et à mesure qu'il progresse vers Montréal et l'accueil dans la ville est impressionnant. « Vive de Gaulle », « Le Québec aux Québécois ». C'est véritablement une ville française qui tend la main à cet invité de marque qui se présente, vers 19h30, à l'hôtel de ville où l'attend le maire Jean Drapeau, fédéraliste convaincu.

    En sortant de l'ascenseur, le général entend les clameurs de la foule et veut aller les saluer par le balcon mais Drapeau l'entraîne de l'autre côté où l'attendent les notables de la ville. De Gaulle suit son idée et se présente au balcon décoré des trois couleurs. Sûr de lui, Drapeau annonce au général que le micro n'est pas branché et qu'il ne peut pas leur adresser la parole mais de Gaulle suit le fil et s'apprête à le brancher lui-même lorsqu'un technicien le devance.

     « C'est une immense émotion qui remplit mon cœur en voyant, devant moi, la ville de Montréal française. Au nom du vieux pays, au nom de la France, je vous salue. ... » et il parle du développement et des progrès accomplis par la ville, de la confiance des Français, de son ami Johnson, des élites québécoises qui pourront bientôt aider la France. « ...La France entière sait, voit, entend, ce qui se passe ici ... Vive Montréal ! Vive le Québec ! ». Une pause pendant laquelle les ovations reprennent puis « Vive le Québec libre ! ». ( voir la vidéo ) « Vive le Canada français et vive la France ! ». C'est du délire dans la foule où les drapeaux bleus et blancs s'agitent.

    Il avait promis qu'on allait l'entendre, on l'a entendu. En quittant le balcon, le général aperçoit la mine inquiète de Couve de Murville, ministre des Affaires étrangères, qui doit imaginer les suites diplomatiques de ces quatre mots qui ont fait connaître le Québec de par le monde. En effet, à Ottawa, on est furieux et on n'apprécie pas du tout car « Vive le Québec libre » est exactement le slogan du Rassemblement pour l'indépendance nationale, RIN, futur Parti Québécois, séparatiste, que fondera René Lévesque un an plus tard. La presse anglaise se déchaîne, le Premier ministre du Canada, Lester B. Pearson, considère ces propos « inacceptables » comme un affront et annule la visite prévue à Ottawa. Les relations entre le Canada et la France ne s'amélioreront qu'après la démission de Charles de Gaulle en 1969.

    Pourquoi avoir prononcé ces paroles ? Contrairement à ses intentions envers l'Algérie, il a toujours été clair sur sa vision du devenir de la Province. « Le Canada français deviendra nécessairement un Etat et c'est dans cette perspective que nous devons agir ».

    Il n'a pas improvisé ce discours, même s'il n'était pas prévu, sauf peut-être la phrase inspirée par l'enthousiasme de la foule : « Ce soir, ici et tout le long de ma route, je me trouvais dans une atmosphère du même genre que celle de la Libération ... ». De Gaulle a toujours minutieusement préparé et appris par cœur les moindres de ses interventions. Ce n'est donc pas sous le coup de l'émotion qu'il aurait « dérapé ». De retour en France, il lâchera « il fallait bien que je parle aux Français du Canada, nos rois les avaient abandonnés ». Et à son gendre : « C'est la dernière occasion de réparer la lâcheté de la France ».

    Pourtant, l'effet politique sur le long terme, voulu par de Gaulle, n'aura pas lieu. Contrairement à 1997, où le 30ème anniversaire de ce discours avait été largement célébré, en présence de Pierre Mesmer et de Philippe Seguin, le 40ème anniversaire en 2007 s'est fait très discret, même du côté du Parti Québécois, comme si la question de la souveraineté n'était « pas morte mais pas forte ». Bravo quand même, les cousins, pour votre constance et votre fidélité !

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    Lorsque le roi Hassan II du Maroc décède, à 70 ans, le 23 Juillet 1999, tous les chefs d'Etat du monde entier, ou presque, font le déplacement à Rabat pour venir saluer sa dépouille. Contrairement à la tradition musulmane, on a même repoussé l'enterrement de 2 jours pour que ceux-ci aient le temps de se rendre devant le Mausolée.

    Son père, Sultan depuis 1927 sous le protectorat français, deviendra roi du Maroc, après l'indépendance en 1956, en adoptant le nom de Mohamed pour montrer sa filiation avec le Prophète. Il va éduquer son fils aîné Moulay Hassan, né en 1929, en l'initiant très tôt à la politique internationale. C'est ainsi que celui-ci dîne, à l'Hôtel Anfa en Janvier 1943, aux côtés de Roosevelt et de Churchill, alors qu'il n'a que 14 ans. Il participe au discours du Trône, en 1952, considéré comme la charte du nationalisme marocain contre le protectorat et accompagne même son père lorsque le sultan est exilé en Corse puis à Madagascar. Il partagera donc son triomphal retour dans le royaume, en 1955.

    Une fois l'indépendance acquise en 1956, son père le nomme Chef d'état-major des toutes jeunes Forces armées royales. C'est à ce titre qu'il réprime, durement, le soulèvement du Rif. Il est proclamé Prince héritier en Juillet 1957 puis devient vice-Premier ministre et ministre de la Défense en 1960.

    Le 03 Mars 1961, à la mort de son père, feu Sa Majesté Mohamed V, Moulay Hassan est proclamé roi du Maroc et donc Commandeur des croyants. Un règne de 38 ans, sans partage, va s'instaurer dans lequel l'opposition sera officiellement autorisée mais pratiquement jamais permise. Malgré l'adoption d'une Constitution, inspirée de celle de la France, en Décembre 1962, le régime est celui d'un pouvoir absolu qui jettera dans les prisons mouroirs des milliers d'opposants réels ou supposés. Après les émeutes de Casablanca, en 1965, par exemple, ce sont 10 ans d'exception qui vont s'abattre sur le pays. C'est à cette époque aussi que le chef charismatique et intègre de l'Union nationale des forces populaires, Mehdi Ben Barka, est mystérieusement enlevé à Paris puis livré à la police d'Etat marocaine, coiffée par le Général Oufkir. On ne le reverra plus.

    Si le pays est tenu d'une main de fer à l'intérieur, c'est un souverain modéré qui s'affiche à l'extérieur du Maroc, auprès des nations occidentales et du monde arabe. Il jouera notamment un rôle actif en faveur des efforts de paix au Proche-Orient, rencontrant l'Israélien Shimon Pérès en 1986, négociant le rétablissement des relations diplomatiques avec l'Algérie en 1988 et en étant l'instigateur de la création de l'Union du Maghreb arabe.

    Les abus que constate la population marocaine ( sévère répression à la suite d'une « suspicion » de complot, par exemple ) vont engendrer le désir, chez certains opposants, de faire disparaître le souverain. Hassan II échappera ainsi à plusieurs attentats dont deux sérieux en 1970 et en 1972 et assouplira le régime à la fin de son règne, en se réconciliant avec les chefs de l'opposition. Il n'aura alors plus qu'une ambition « Etre un grand roi » mais il ne renonce pas à sa fortune personnelle qui dépasserait, et de loin, la dette nationale du pays, de quoi entretenir les nombreux palais opulents qu'il possède au Maroc, sans compter un riche manoir près de Paris.

    En Octobre 1975, Sa Majesté le Roi organise la glorieuse « Marche verte » de 350.000 Marocains brandissant des drapeaux et le Coran, en direction de l'ancienne colonie espagnole du Sahara occidental, ce qui lui fournit l'occasion de refaire l'unité autour de sa personne et d'annexer ensuite, par occupation, le territoire que lui disputait la Mauritanie et, surtout le Front Polissario.

    Ce fin politique, diplômé en France, père de cinq enfants, à l'aise et diplomate sur le plan international, dur et arbitraire sur le plan intérieur, aura tenté de concilier modernisme et tradition, Orient et Occident dans un Maroc qu'il a, certes, structuré et unifié mais qu'il laisse à son fils, Mohammed VI, en net retard social et éducatif.

    Quelle facette de sa personnalité les 60 chefs d'Etat, venus s'incliner devant son cercueil, vénéraient-ils le plus, ou le moins ? Mystère de la politique.

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    Ce matin, il me prend l'envie de vous parler d'un drôle de soldat mais de ceux dont le caractère trempé est comme l'acier de leurs biceps endurcis par les coups, et qui, tel un James Dean ou Gérard Philippe des rings, a su rejoindre la légende par une disparition prématurée.

    Il fallait véritablement un coup de pouce du destin pour abattre le « bombardier marocain » comme était surnommé Marcel Cerdan dans le monde de la boxe, dans les années 1940, sinon nul n'aurait arrêté ce petit homme nerveux et trapu, de 1,69 mètres et 73 kilos. Sans cet accident d'avion fatal du 28 Octobre 1949, Cerdan aurait continué à perforer toutes les défenses gantées de ses adversaires qui craignaient son doublé du droit, express comme l'éclair.

    Marcellin Cerdan est né en Algérie, le 22 Juillet 1916. Il a 6 ans lorsque sa famille s'installe à Casablanca, au Maroc. Son père l'entraîne à la boxe, comme ses frères, alors que le jeune Marcel s'intéresse plutôt au football, pour lequel il a d'ailleurs des aptitudes. Sur le ring, il s'entraîne pourtant durement et arrive, à 17 ans, à son premier combat professionnel, en 1933, avec un moral de vainqueur. On est à Meknès et il descend son premier adversaire. Ses succès le font vite remarquer et il monte à Paris où il débute à la Salle Wagram. Il gagne alors tous ses combats et devient champion de France en 1939 puis champion d'Europe. Dur sur le ring, puncheur très mobile sur ses courtes jambes, il paraît invincible.

    Mais aux Etats-Unis, Tony Zale est surnommé « Le roi du K.O. », c'est une autre paire de manches. Le 21 Septembre 1948, cependant, en arrêtant le combat à la douzième reprise, l'arbitre déclare Marcel Cerdan champion du monde des poids moyens. Le bombardier a encore frappé mais les esprits, cette fois.

    C'est là-bas qu'il rencontre Edith Piaf, la môme qui chante l'amour des gens du peuple avec cette voix si puissante, et qu'il n'avait qu'entre aperçue à Paris. C'est le coup de foudre. Une passion intense va naître entre la frêle chanteuse et le cogneur qui s'était pourtant marié en 1943 avec Marinette Lopez et dont il aura trois garçons. Cerdan est un héros. A Paris, on acclame ce petit Français du Maroc qui a su défier les Américains chez eux.

    Mais la roue de la fortune est imprévisible et, le 17 Juin 1949, Marcel est dépossédé de son titre et de sa ceinture par Jake la Motta. Aussitôt, une revanche est programmée pour le 2 décembre 1949 au Madison Square Garden. Une voyante aurait pu dire que le 2 décembre est une bonne date puisque c'est le jour du sacre de Napoléon et de sa plus belle victoire à Austerlitz. Las, pour Marcel, c'est la chute au sens propre car l'avion Constellation qui l'emporte de Paris à New-York où il doit s'entraîner et rejoindre Edith, s'écrase aux Açores, le 27 Octobre 1949, en faisant 48 morts. Parmi les victimes, on déplorera aussi la perte de la violoniste Ginette Neveu et du peintre Bernard Boutet de Monvel. Edith Piaf ne se remettra jamais de cette disparition et sombrera dans le spiritisme.

    Malgré cet arrêt brutal de sa carrière, Cerdan affiche un palmarès exceptionnel : Sur 123 Combats disputés ( Ali n'en compte que 57 ), seulement 4 défaites et 12 adversaires mis K.O. dès le 1er round dont le plus rapide, en 1942, au bout de 22 secondes face à Gustave Humery qui restera plusieurs heures dans le coma. Champion du monde, 4 fois champion d'Europe et 5 fois champion de France, Marcel Cerdan aurait sans aucun doute eu une carrière à la Cassius Clay.

    Ses cendres ont été inhumées au Maroc puis, en 1995, au cimetière Sud de Perpignan. Soixante ans ont bientôt passé depuis sa mort et, malgré tout, il reste dans le haut du classement des sportifs préférés des Français, à l'égal des Zidane, Platini, Pelé, Douillet ou Prost.

    C'est pour lui qu'Edith Piaf, malgré sa profonde déprime, écrira sa chanson « l'Hymne à l'amour ». L'un et l'autre sont indissociables dans notre mémoire collective. J'ai encore envie de lui crier « Aller, chauffe Marcel ».

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