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Il est des dates qui marquent chacun d’entre-nous : son anniversaire, le premier flirt ou la perte d’un parent proche. Qui ne se souvient de ce qu’il faisait le jour du 11 Septembre 2001 ? Pour ma part, participant à une réunion internationale à Bruxelles, je revois la mine d’incompréhension de nos collègues américains à qui l’on venait d’apprendre, en ce « nine-eleventh », la nouvelle des attentats sur les tours jumelles de NY et le Pentagone.
Le 09 Novembre est de ces dates là : En France, on se souvient de la chute du mur de Berlin en 1989, plus rarement de la mort du Général de Gaulle en 1970, qui eut lieu pourtant le même jour.
Les Allemands, eux, ne sont pas prêts d’oublier les évocations liées aux quatre 09 Novembre de leur Histoire :
Cela commence en 1918, après 4 ans de guerre et un début d’insurrection des comités de soldats et ouvriers qui veulent suivre l’exemple des Bolcheviques de Russie, lorsque la « République allemande » est proclamée à Berlin par Philipp Scheidemann, social-démocrate, d’une fenêtre du Reichstag puis par le spartakiste Karl Liebknecht, quelques heures plus tard, depuis le balcon du « château », place Marx-Engels. Ce 09 Novembre, l’Empereur a abdiqué, le II° Reich a vécu. S’ensuivra la « November-revolution » qui débouche, en 1919, sur la République parlementaire de Weimar jusqu’en 1933.
Puis, en 1923 soit 10 ans avant qu’il n’accède au pouvoir et au poste de chancelier par la grâce du Maréchal Von Hindenburg, un inconnu nommé Adolf Hitler, chef du NSDAP ( NationalSozialistische Deutsche ArbeiterPartei ), Parti national-socialiste des travailleurs allemands créé à Munich, qu’on appellera bientôt Nazi par dérision, tente un putsch par la force, en Bavière, avec l’appui du Général Erich Ludendorff. Alors que les dirigeants du Land, du balcon d’une brasserie, s’adressent à 3.000 bourgeois inquiets de l’occupation de la Ruhr, Hitler fait irruption, révolver au poing, à la tête des militants du NSDAP, pour les intimer de lui céder le pouvoir. Bilan : 16 morts et un bref passage en prison pour Hitler. Dans le subconscient des Allemands, cette date du 09 Novembre 1923 ( le putsch de la brasserie ) reste comme la première action publique des Nazis en Allemagne.
Toujours un 09 Novembre, mais en 1938 cette fois, est déclenchée la « Nuit de Cristal » contre les Juifs, à vrai dire un véritable Pogrom ( Reichspogromnacht ) au cours duquel plus de 100 personnes sont tuées, une centaine de synagogues brûlées et des milliers de magasins pillés. A l’origine, un jeune juif polonais agresse le diplomate allemand Ernst von Rath à Paris. Il n’en faut pas plus à Goebbels, ministre de la propagande, pour dénoncer un complot juif et lancer les SA ( Sturm Abteilung = sections d’assaut ) et les Jeunesses hitlériennes dans les rues des principales villes, notamment Berlin et Vienne.
Enfin, et là vous en lirez des tonnes de pages ce mois-ci dans toute la presse, le 09 Novembre 1989, le mur de Berlin tombait, aux airs de violoncelle de Rostropovitch. Entre la République démocratique et la République fédérale allemandes, un vrai mur double de pierres et de barbelés avait été construit dès 1961 pour empêcher la fuite des cerveaux Est-allemands vers l’Eldorado de l’Ouest. En Mai 1989, ce « mur de la honte » commence à se fendiller entre la Hongrie et l’Autriche, brèche où s’engouffrent des milliers de personnes. Puis, poussés par la « perestroïka » et la « glasnost » initiées par Mikhaïl Gorbatchev, les dirigeants de RDA pensent réduire les manifestations de plus en plus nombreuses par une politique d’ouverture timide des frontières et ils autorisent les Allemands de l’Est à voyager à l’étranger « sans aucune condition particulière ». C’est la ruée vers les postes frontières qui restent cependant fermés, n’ayant pas encore reçu l’ordre d’ouvrir les barrières. Au bout de quelques heures, débordés, les douaniers les laissent tout simplement passer sans contrôle. Dès le lendemain, le mur de béton est attaqué par tous les moyens que les Berlinois trouvent à leur portée. Stupeur dans le monde entier, de part et d’autre du mur, où l’évènement n’avait en aucune manière été anticipé.
Malheureusement, il reste encore aujourd’hui, dans le monde, d’autres murs entre les peuples. Egoïsme et préservation des acquits locaux, peur de l’étranger, exclusion et refus du partage en sont la cause persistante. Les véritables murs sont dans la tête et le cœur des peuples. Et de ceux-là, aucune pioche ne viendra à bout, hélas.
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