• Richard Coeur de Lion

    Déçue et bafouée, Aliénor d’Aquitaine se résigna, en 1157, à quitter l’Angleterre et son volage de roi, Henri II Plantagenêt, pour retourner sur ses terres, en Aquitaine et Poitou. Elle emporta avec elle son plus jeune fils, Richard, né à Woodstock le 08 septembre 1157. A Poitiers, capitale des domaines de sa mère, le jeune Richard se découvre un appétit pour les tournois (il a hérité de la force de son père) mais aussi les langues et la poésie. A onze ans, il devient comte de Poitiers et duc d’Aquitaine. Son père Henri II, roi d’Angleterre, avait en effet légué à ses fils, dès son vivant, les terres qu’il possédait de part et d’autre de la Manche. Le trône d’Angleterre reviendrait à Henri, devenu son aîné après la mort prématurée de Guillaume, l’Aquitaine et l’Anjou au cadet Richard et la Bretagne à Geoffroy. Il ne restait donc plus rien pour Jean, le petit dernier, qui fut alors affublé du surnom de Jean sans Terre.

    Mais l’aîné Henri, dit le Jeune pour ne pas le confondre avec son père Henri II, veut aussi la Normandie. Son père refuse et dote Jean de plusieurs châteaux pris sur l’héritage d’Henri, ce qui ne satisfait pas ce dernier. Dès lors, les frères vont, tour à tour, se faire la guerre ou se retourner contre leur père, le roi d’Angleterre. Belle ambiance quand on sait que la mère, la reine Aliénor, prendra elle aussi parti pour l’un ou l’autre, contre le père.

    Celui-ci ne fait pas dans la demi-mesure non plus. Ayant enlevé son ex femme Aliénor à Chinon, il la séquestre dans la tour de Salisbury puis abuse de la jeune Alix, fille du roi de France Louis VII, promise en mariage à son fils Richard, pendant que celui-ci soumet par la force, avec l’aide de « cottereaux » mercenaires, les seigneurs d’Aquitaine, peu enclins à suivre ce brutal chef de guerre.

    Pendant qu’ils se querellent sur le partage de l’empire anglo-angevin, les Plantagenêt, père et fils, ne voient pas les manœuvres du nouveau roi de France, Philippe-Auguste dont l’objectif est de leur ravir leurs possessions françaises. Par malheur, c’est à la cour de ce roi capétien que Geoffroy, le troisième prétendant au trône derrière Henri II, meurt piétiné lors d’un tournoi, en 1186, trois ans après la mort par maladie du fils aîné Henri le jeune.

    Richard devient ainsi l’héritier de la couronne d’Angleterre, à laquelle on accole la Normandie. Mais le fougueux Richard se soucie bien moins de l’Angleterre, dont il ne parle pas la langue, que de l’Aquitaine-Poitou-Anjou où sa mère Aliénor l’a élevé. D’ailleurs, bien qu’investi Roi, sous le nom de Richard 1er, après le décès de son père Henri II en 1189, il ne pense qu’à guerroyer. Ne dit-on pas que Jérusalem vient de tomber aux mains des Sarrasins ? Il sera Croisé dans cette nouvelle croisade de 1190, 40 ans après la précédente. Mais, malin ou inquiet, il entraîne avec lui le roi de France Philippe II Auguste, sentant bien que celui-ci profiterait de son absence pour faire main-basse sur ses terres.

    Récupérant sa nouvelle fiancée Bérengère et sa sœur Jeanne, échouées à Chypre, Richard se rend avec sa flotte à Saint-Jean-d’Acre, au nord de la Palestine, qu’il conquiert sur les Turcs, avec son ami Robert de Sablé, ce qui lui vaudra le surnom de « Richard, cœur de lion ». Puis il remonte le long de la côte sans toutefois atteindre Jérusalem. C’est donc un échec qu’il accepte en signant, avec le sultan Saladin, une trêve de trois ans.

    Philippe Auguste, lui, était déjà rentré en France et ourdissait des intrigues avec Jean sans Terre. L’apprenant, Richard se décide à rentrer à son tour mais un naufrage l’abandonne sur les côtes italo-croates avec ses compagnons d’infortune. Le petit groupe tente de regagner le royaume par la terre mais les voyageurs seront reconnus par les hommes du duc Léopold que Richard avait eu la malencontreuse idée d’humilier pendant la croisade. Léopold vend son prisonnier royal à l’empereur d’Allemagne, lequel ne le libérera qu’en 1194 contre une énorme rançon.

    De retour en Normandie, qu’il veut reconquérir sur Philippe-Auguste, Richard obtient quelques succès puis conclut un traité avec le roi de France, par lequel ils se répartissent les forteresses normandes. C’est l’époque où émerge le puissant Château-Gaillard, le long de la Seine aux Andelys.

    Son dernier fait d’armes sera moins glorieux. Convaincu qu’un trésor se cache dans la seigneurie de Châlus Chabrol, près de Limoges, Richard cœur de lion décide de s’en emparer, avec son fidèle lieutenant Mercadier, d’autant que la forteresse est mal défendue. Alors qu’il en fait le tour pour l’inspecter, un arbalétrier nommé Pierre Basile lui décoche un carreau d’arbalète qui se fiche dans l’épaule du roi. Celui-ci arrache la flèche mais les quatre pans de son fer lui déchirent la plaie. Mercadier fera mettre à mort l’imprudent. La blessure royale est mal soignée et la gangrène s’installe. Sa mère Aliénor arrivera juste à temps pour voir agoniser et mourir, le 06 avril 1199, son fils préféré. Elle fera enterrer le roi-chevalier en l’abbaye de Fontevraud et déposer son cœur en Normandie, dans la cathédrale de Rouen.

    La reine-mère se consolera en voyant Jean sans Terre prendre sa revanche et s’installer sur le trône d’Angleterre, au détriment d’Arthur, le neveu légitime. Hélas, le conflit entre les deux prétendants précipitera la fin de la dynastie des Plantagenêt.

     


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