• Macbeth, roi d Ecosse

    En ce vendredi 15 août, jour de l’Assomption, tout le monde pense au débarquement de Provence en 1944. Je souhaite vous évoquer une autre histoire.

    Le royaume d’Ecosse, cette contrée inhospitalière au nord des îles britanniques, s’est constitué, au Moyen-âge, à la force du glaive par des peuples rudes et fiers. Ce furent, tour à tour, les Pictes alliés aux Scots venus d’Irlande, avant l’an 900, sous les règnes de Kenneth 1er Mac Alpin et Donald, premiers rois d’Ecosse, puis les Celtes bretons, les Angles venus de Germanie et enfin les païens Vikings scandinaves. De l’autre côté de la Manche, c’est l’époque de Charlemagne.

    On ne s’étonnera pas que la conquête du pouvoir de ce Scotland, royaume âpre et austère, se soit faite plus volontiers par l’usurpation brutale que par la négociation, le consensus ou l’hérédité.

    A la mort de Malcolm II en 1034, c’est son petit-fils Duncan qui est placé, à 33 ans, sur le trône d’Ecosse. Cela ne plait pas du tout au Comte de Moray (une province à l’Est des Highlands peuplée de Pictes puis de Vikings) nommé Macbeth, un rude guerrier jusqu’alors grand serviteur du roi, du fait que ce dernier pensait que le titre royal devait lui revenir car il avait épousé Gruoch, la petite-fille de Kenneth III, assassiné justement par le dit Malcolm II. Or, le système des Thanes (seigneur d’un Comté local), hérité des Celtes, établit que le droit au trône est conféré par la mère, ce qui légitimait Macbeth à ses yeux. Pendant 6 ans, il va ruminer sa colère et sa frustration, d’autant plus exacerbées que le nouveau roi Duncan, qu’il juge usurpateur, en vient à se mêler des affaires du comté de Moray, celui de Macbeth.

    C’est au cours de la bataille de Pitganevy (aussi nommée Bothnagowan), près d’Elgin, sur ses terres de Moray donc, que Macbeth défie le roi et ses troupes le 14 août 1040. Par traitrise vraisemblablement, il le fait assassiner, et se proclame Roi d’Ecosse à sa place. Il pensera expier son meurtre par un pèlerinage à Rome en 1050.

    Les deux fils de Duncan, Malcolm et Donald, s’enfuient en Angleterre mais n’auront de cesse de venger leur père.

    Le fier roi d’Ecosse, Macbeth, poursuit la politique de Malcolm II, l’un de ses prédécesseurs, et lève des troupes pour conquérir, lui aussi, la Northumbria, au nord-est de l’Angleterre sur la côte Est. Malcolm en avait conquit le Lothian jusqu’à la rivière Tweed au sud d’Edinburgh. Macbeth veut poursuivre encore plus au sud. Mais le 27 juillet 1054, à Dunsinane, près de Perth, il est battu par Siward, le comte de Northumbria, qui avait rassemblé une armée mixte composée d’Anglais, de Scandinaves et d’Ecossais. Entouré de Normands fidèles, Macbeth cède le Lothian et se réfugie plus au Nord.

    Or, Siward, le vainqueur de Dunsinane, appartient à la famille de la femme du futur Malcolm III, l’un des fils du roi Duncan que Macbeth avait malicieusement tué pour prendre sa place. Comme le monde d’Ecosse est petit !

    Depuis cette date fatidique de 1040, Malcolm n’a pas oublié la mort de son père et prépare sa vengeance depuis son exil anglais, c’est à dire renverser Macbeth qui se croit invincible. L’occasion lui en est donnée le 15 août 1057, à Lumphanan, 30 kilomètres à l’ouest d’Aberdeen. Au cours d’une escarmouche, les deux hommes se battent et c’est Macbeth qui est blessé, suffisamment sérieusement pour que la mort survienne à la suite des coups portés.

    Malcolm pense que son tour est alors venu de ceindre la couronne royale tant attendue mais tout le monde l’a oublié et c’est le fils de Lady Macbeth, la fameuse Gruoch, que les partisans de Macbeth, encore assez puissants, vont proclamer Roi à Scone (près de Perth). Le jeune Lulach, 25 ans, est bien fils de la veuve de Macbeth et d’un certain Gillcomean qui dirigea le Comté de Moray, avant que Macbeth ne l’élimine lui-même pour le remplacer à la tête du Comté mais aussi dans le lit de sa femme. Lulach est ainsi devenu son beau-fils.

    C’en est trop pour Malcolm qui monte une embuscade à Essie, le 17 mars 1058, dans la région de Strathbogie (sud de l’Ecosse, nord de Liverpool, Manchester actuels) et élimine ce rival jeune mais gênant. Dès lors, il se fait appeler Malcolm III, ce qui lui sied mieux que « Canmore », surnom qui veut dire « grosse tête ». Sa dynastie durera 200 ans jusqu’à l’avènement des Stewart.

    C’est ainsi que, par le glaive qui transperça Duncan, Macbeth et Lulach, fut donné un roi unique à l’Ecosse. Les guerres sur l’île de Bretagne insulaire n’en étaient pas finies pour autant. Bientôt, en octobre 1066, le dernier roi anglo-saxon d’Angleterre, Harold, devra s’incliner à la bataille d’Hastings, tout à fait au sud des terres anglaises, face au Français Guillaume de Normandie.

    Cette histoire n’aurait jamais été connue sans la curiosité de William Shakespeare qui s’en inspira, en la déformant, pour réaliser, en 1623, sa fameuse tragédie (ne dites pas Macbeth, ce qui porte malheur, mais The Scottish Play). Sans doute, 800 ans tout justes après les aventures du vrai Macbeth, faut-il aussi imputer cette mémoire historique à l’opéra musical de Giuseppe Verdi.

    Si vous passez un jour par Edinburgh, Glasgow ou Aberdeen, vous aurez peut-être la chance de voir un guerrier Gaël en costume d’époque perpétuer la danse victorieuse Ghillie Callum qu’avait engagée Malcolm à Dunsinane au dessus de deux épées croisées au sol, la sienne et celle de son adversaire.


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