• La Smala d’Abd-el-Kader.

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    Pour répondre à un affront fait par le Dey d'Alger au Consul français, en 1827, une expédition fut déclenchée depuis Toulon qui sera le départ de la colonisation de l'Algérie, dès 1830. Louis-Philippe a pour stratégie une « occupation restreinte », c'est-à-dire s'emparer seulement de quelques villes sur la côte : Oran, Bône, Mostaganem. Dans l'intérieur du pays, un jeune chef, Abd-el-Kader, né le 06 Septembre 1808, fils d'un marabout descendant du Prophète, avait été proclamé « émir » par les tribus de sa région de Mascara dans l'Oranie et se battait contre les sultans turcs de Tlemcen. Ne voulant pas administrer tout le pays, les Français signèrent avec lui, en 1834, un traité d'amitié qui lui reconnaissait l'autorité sur ses rivaux indigènes et l'ensemble des autres tribus.

    Tranquilles de ce côté, les français commencèrent à fonder un port, à construire des routes et assécher les marais en vue d'y accueillir des colons. Comprenant que le mouvement ferait tâche d'huile, Abd-el-Kader se jeta brusquement, en 1839, sur la riche plaine de la Mitidja et la mit à feu et à sang. Il avait déjà obtenu une petite victoire locale, en 1835, à la Macta, contre un général qui avait empiété sur ses limites tacites et il se sentait fort pour mener un « Jihâd », une guerre sainte.

    De ce fait, le gouvernement français envoya le général Thomas Bugeaud, à la tête de l'Armée d'Afrique, avec mission de conquérir toute l'Algérie. Constituant des unités légères, zouaves, cavaliers spahis, chasseurs ou tirailleurs, françaises et indigènes et manoeuvrant en colonnes mobiles, Bugeaud fit la chasse aux excellentes et insaisissables troupes d'Abd-el-Kader qui se renforçaient de mois en mois. Mais Bugeaud mit la main sur Taqdemt, la capitale de l'émir, et occupa l'ancienne, Mascara. De plus, il l'affaiblit par des offensives incessantes et une politique de terre brûlée en avant de sa progression.

    Le 16 Mai 1843, alors que l'émir patrouille à quelque distance avec ses hommes armés, le duc d'Aumale, fils du roi Louis-Philippe, tombe sur la « Smala » d'Abd-el-Kader, avec sa troupe de 600 Spahis, y sème la terreur et s'empare d'un butin considérable. La Smala de l'émir est constituée par une énorme suite de serviteurs, de femmes et d'enfants, poussant devant eux les troupeaux, bref, une capitale ambulante, sous toile, d'environ 30.000 personnes qui s'étend sur plusieurs kilomètres. Aumale s'empare ainsi de 50.000 têtes de bétail, de 15.000 prisonniers, des manuscrits de l'émir qui lisait et écrivait beaucoup. Ce coup d'éclat aura un énorme retentissement en France et précipitera l'exil d'Abd-el-Kader vers le Maroc.

    Pas de chance pour l'émir de Mascara, Bugeaud se trouve aussi à la frontière marocaine et il défait, en Août 1844 sur la rivière d'Isly, les troupes marocaines du Sultan Abd-al-Rahman qui avait recueilli l'émir. Repoussé vers l'Algérie, encerclé par les colonnes françaises, Abd-el-Kader se rend au général Lamoricière, en Décembre 1847.

    Commence alors, pour lui et sa famille, une longue captivité en France, alors que le duc d'Aumale lui avait promis de l'emmener en terre d'Islam, au plus près de La Mecque. Emprisonné à Toulon, puis au château de Pau et enfin à Amboise, il ne sera délivré qu'au bout de 5 ans, en 1852, par Napoléon III lui-même qui vient d'accéder au pouvoir. Au château d'Amboise, l'émir philosophe avec des généraux et des religieux français et écrit une série d'œuvres pour expliquer l'Islam aux Français. Dès lors, un parti « kadérien » se forme qui réclame, avec succès, sa libération.

    Début 1853, libre et muni d'une confortable pension financière du gouvernement français, il aborde Istanbul puis s'installe définitivement, avec un groupe d'exilés, à Damas où se trouve le tombeau du grand mystique musulman Ibn Arabi, pour y enseigner la théologie.

    En 1856, des chrétiens maronites sont massacrés au Liban et en Syrie car l'Empire Ottoman est accusé de leur donner trop de droits. Abd-el-Kader, fils de Mahi-ed-Dine, le « Moghrebin », accompagné de ses compagnons algériens, parcourt la ville de Damas et repousse les émeutiers afin de protéger les chrétiens et leurs familles. Il leur offre même l'hospitalité de sa demeure et sermonne ses frères musulmans. Encensé pour ce geste, il recevra de nombreux hommages en Occident ainsi que le grand cordon de la Légion d'Honneur.

    A Damas, où il mourra le 26 Mai 1883, ce grand humaniste, fin politique, moderne et cultivé, se consacre à la religion et à la littérature, écrivant de nombreux ouvrages et poèmes, enseignant les grands textes coraniques. L'enseignement de l'émir Abd-el-Kader est un modèle de tolérance, d'ouverture et de réconciliation. Toutes les prières, enseigne-t-il, qu'elles émanent de quelque religion que ce soit, s'adressent à un Dieu unique. Le respect de tout individu, même prisonnier, est essentiel.

    Ce grand soldat, cavalier émérite, ne manquera jamais de rappeler ce verset du Coran : « Celui qui tue un homme tue l'humanité tout entière ». Dommage que ce verset ait été arraché du Livre Saint de nombreuses factions actuelles qui se réclament pourtant de leur religion pour justifier des actes ignobles.

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  • Commentaires

    1
    Dimanche 7 Septembre 2008 à 20:58
    Bel éclairage
    tant sur cet homme politique-et fin érufit,- que sur le message d'humanisme et de dignité qu'il aura eu, et dans la peine, à en esquisser les contours. L'on y gagnerait, en cette époque toute "retournée", à en connaitre et (com)prendre toute la mesure, toute la portée.
    2
    Lundi 8 Septembre 2008 à 14:31
    Poèmes.
    Merci Flâneur pour ce commentaire qui conforte mon sentiment que ce grand érudit, rassembleur de croyances opposées, gagnerait à être connu de ce côté mais aussi de l'autre côté de la Méditerranée. Bravo aussi pour ton blog de poèmes tout en sensibilité.
    3
    harkati
    Mardi 23 Juin 2009 à 18:01
    commentaire
    alors tout ce bordel avec 150 ans de colonialisme pour un coup d'eventail, mais , quel perspicacité , quel analyse historique!!
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    4
    Petit fils d'Abd el-
    Dimanche 19 Décembre 2010 à 19:03
    remerciment
    Bonjour, De nos jours encore peu de personnes connaissances la facette humaniste de cet homme de foi. Mais il serait utile pour vous de vous référer à des auteurs tels que Eric Géofoi, Ahmed Bouyerdene, Raled ben-Tounes... Bonne lecture !
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