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Lorsqu’en Mars 1941, le jeune colonel-auto-proclamé Leclerc fait serment, avec ses hommes qui ont libéré l’oasis de Koufra en Lybie, de ne déposer les armes que lorsque les belles couleurs du drapeau français flotteront à nouveau sur un Strasbourg occupé par les Allemands, nul n’aurait osé imaginer que le général Philippe de Hauteclocque, son vrai nom, libérerait Paris, peu après, avec sa 2ème DB, en Août 1944 puis Strasbourg en Novembre avant de pousser jusqu’au nid d’aigle de Hitler à Berchtesgaden.
C’est cet homme, fidèle de la première heure au général de Gaulle, qui disparaît subitement et mystérieusement dans les sables du Sud Algérien, le 28 Novembre 1947, avec 12 autres passagers du bimoteur B-25 qui les emmenait à Colomb-Béchar pour une inspection.
La nouvelle de sa mort jette un froid sur une France déjà morose en ces temps de début de guerre froide.
Le Lieutenant François Delluc, pilote du bombardier B-25, professionnel expérimenté qui avait effectué plusieurs missions de bombardement nocturne au dessus de l’Allemagne nazie, ne peut pas être suspecté d’avoir outrepassé les limites de l’avion ou d’avoir mésestimé le danger météo. Il est vrai que le temps était exécrable au départ d’Oran mais l’avion avait la capacité de revenir à son point de départ sans risque. Mieux, il préfère percer la couche bien avant d’être à la verticale de Béchard, en profitant d’une trouée, puis terminer le vol à vue, sous les nuages, en suivant par sécurité la voie ferrée qui mène à l’aéroport. « Tout va bien à bord, nous sommes à 10 minutes du terrain » lance-t-il à la radio.
Mais c’est cette descente inhabituelle qui va indirectement être la cause du drame car les passagers se sont regroupés à l’arrière, là où se situait un hublot ventral d’observation. Ce déport de masse, combiné à la faible vitesse entraîne un décrochage et une vrille à plat. L’avion s’écrase et se disloque sur la voie ferrée à 60 km du lieu de destination.Sans savoir combien de passagers se trouvaient à bord, les militaires envoyés sur place dénombrent 13 cadavres déchiquetés alors que dans le même temps, Alger dépêche 12 cercueils plombés. Douze et pas treize car l’avion comptait, outre le général Leclerc, 5 membres d’équipage et 6 officiers accompagnateurs.
Alors, qui est ce treizième homme qui sera déposé dans un cercueil tout simple, sans plaque, et emporté hors de la vue des officiels ? Le mystère subsiste, entraînant les rumeurs de complot ou d’attentat. Aucun service secret, aucune famille n’a depuis réclamé le corps de cet inconnu.
Le général Leclerc, héros de la France libre, le représentant de la France lors de la reddition du Japon en 1945, sera élevé à la dignité de maréchal de France, à titre posthume en 1952, en même temps que Jean de Lattre de Tassigny puis inhumé dans la crypte des Invalides, aux côtés d’autres grands noms de l’histoire militaire française.
Sa mort brutale avec ce mystérieux treizième homme conforte la légende qui se crée à son endroit. Une ascension vertigineuse et une chute soudaine comme une comète, voilà Leclerc !
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A l’époque où l’empire britannique des Indes était installé à Calcutta, c’est à dire avant la création du Pakistan, la frontière à l’Ouest de ce « British Raj » menait en Afghanistan. Pour garder libre la route des Indes, une « British army of India » mélangeant Anglais et Gurkhas, sillonnait toute la région.
Les Russes, de leur côté, ont toujours voulu s’ouvrir une porte au Sud de leur continent vers la mer Caspienne et la mer d’Oman. C’est pourquoi leur diplomatie s’est orientée vers la Perse devenue Iran.
A Kaboul, dans les années 1835-1840, l’émir Dost Mohammed, qui avait remplacé l’ancien roi Shah Shoja, se laissa convaincre que la protection russe était plus sûre que la britannique. Ce qui ne plût nullement à ces derniers qui dépêchèrent l’Armée de l’Indus, 16.500 hommes, vers Kandahar et Kaboul. Après une marche difficile, on s’y installa pour les quartiers d’hiver et on y mena grand train, notamment avec les femmes indigènes.
Mais les Afghans sont un peuple fier qui ne supporte pas la présence d’étrangers sur leur sol. Le 02 Novembre 1841, le ressentiment est tel qu’une émeute éclate au cœur de la ville. Le diplomate anglais Alexander Burns, qui avait choisi de loger dans une maison de maître près du bazar plutôt que dans le campement sécurisé, fut assailli puis tué, sous prétexte qu’il y organisait des soirées de débauche.
Craignant un soulèvement général, le chef de l’expédition britannique ordonne un repli immédiat sur Jalalabad situé à une semaine de marche. Un convoi est formé à la hâte qui s’étire sur plusieurs kilomètres. Dans ce paysage montagneux, aux gorges étroites, les pillards afghans à cheval ont beau jeu de dépouiller cette armée en déroute. D’abord les bagages de couvertures et de tentes, puis de nourriture. Les femmes et enfants sont maintenus en arrière mais les attaquants n’en ont cure, ce sont des infidèles qui les avaient humiliés lors de leur arrivée en force, donc pas de quartier et l’hiver, rude et enneigé, fait le reste. C’est une complète débâcle dont la légende dit que seul le médecin Brydon parviendra à échapper au massacre et à atteindre Jalalabad.
Ecoutons Vincent Eyre dans « Journal du lieutenant V. Eyre de l’artillerie du Bengale », Janvier 1842 : « … les cruels Afghans recommencèrent de très bonne heure à nous tourmenter de leur feu …/… à l’entrée du défilé, on essaya de séparer les troupes valides des non-combattants …/… il est difficile de concevoir avec quelle rapidité ces deux nuits passées à la gelée avaient désorganisé l’armée …/… l’idée de franchir l’étroit défilé que nous avions devant nous et cela, à la face de toute une population armée et avide de carnage, embarrassés comme nous l’étions par une multitude immense et désordonnée, était bien faite pour nous saisir d’effroi …/… bientôt, la foule fut au milieu du feu et ce ne fut plus qu’un carnage épouvantable …/… quand l’armée eut atteint Khoord-caboul, la neige avait commencé à tomber …/… on n’avait pu sauver que quatre tentes qui avaient été réservées aux dames et aux enfants, ainsi qu’aux malades …/… on n’entendit de tous côtés que des gémissements, des plaintes et des cris de détresse … »
Pour les Britanniques, c’est un affront et une atteinte à leur prestige mondial qu’il faut laver aussitôt. Une expédition punitive sera organisée dans les mois suivants mais celle-ci ne réussira qu’à raser le riche Bazar couvert de Kaboul. Après la signature d’un traité de paix que nul ne songeait à respecter, les Anglais se retirent vers leur bastion indien, joyau de la couronne, qu’ils devront livrer également en 1947 à Gandhi et Nehru.
Les soldats de la reine Victoria venaient ainsi, les premiers, de mesurer la farouche détermination du peuple afghan qui ne cède jamais devant l’occupant, comme en feront l’amère expérience les troupes soviétiques entre 1979 et 1989 et les troupes américaines encore aujourd’hui.
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