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Il y a exactement 60 ans, le 18 Mars 1949, était publié le texte établissant l’OTAN, Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, traduction française du NATO, North Atlantic Treaty Organization. On ne blasphème pas ni ne trahissons le concept en francisant le sigle car, dès l’origine, la langue française fut acceptée comme langue officielle de l’organisation, si bien qu’on peut s’y exprimer ( fait unique ) dans l’une ou l’autre langue.
Fondé sous l’égide des Etats-Unis et signé le 4 Avril de la même année par le Canada et la plupart des pays de l’Europe de l’Ouest, ce traité visait à organiser l’Europe, ravagée par la deuxième guerre mondiale, face à une Union Soviétique victorieuse prête à y instaurer le communisme en élargissant ce qui allait devenir le Pacte de Varsovie.
De fait, en aidant à la reconstruction de l’Europe avec le Plan Marshall et en y maintenant des troupes américaines et canadiennes aux côtés des forces européennes, l’OTAN a largement contribué à l’équilibre planétaire de la terreur, bloc contre bloc et a donc évité un nouvel affrontement pendant un demi-siècle.
Cependant, après l’effondrement du mur de Berlin en 1989 et donc du bloc soviétique, on aurait pu se demander à quoi allait servir cette usine à gaz puisque sa cible ennemie avait disparue. Elle a su justifier de son utilité et se maintenir, s’élargir même, en se transformant à la marge pour continuer à paraître incontournable. Les 22.000 employés permanents respirent. Par exemple, c’est l’OTAN qui aide actuellement le gouvernement irakien en matière de sécurité, aux côtés de la Force internationale de stabilisation, à Bagdad.
Depuis la décision du Général de Gaulle, en Mars 1966, de retirer la France du Commandement intégré de l’OTAN, afin d’éviter l’automaticité de soumission et d’engagement et pour conserver aux décideurs nationaux le plein emploi des forces nucléaires notamment, la planète savait que la France tenait une place particulière au sein de l’Alliance, à la fois allié fidèle quand il le faut et à la fois membre jaloux de son autonomie de décision quand elle le souhaitait. Le meilleur exemple de cette singularité nous est fourni par le discours de Dominique de Villepin, à la tribune des Nations Unies, en Février 2003, lorsque le Ministre des Affaires étrangères qu’il était alors fut le seul à plaider contre la guerre en Irak. Cette position originale, cette liberté de parole et d’action qui n’entamaient pas la fidélité sans réserve aux grands principes, avait fini par être acceptée par tous les membres et notamment par les Américains eux-mêmes.
Or voici que le Président de la République actuel prend tout le monde à contre pied en annonçant, sans consulter le Parlement ni le peuple, le retour complet et définitif de la France dans la structure intégrée. Le bénéfice de cette mesure, hormis la satisfaction des américains, me semble douteux et incertain pour la France :
Le président nous dit qu’il faut choisir des alliés « forts » mais le plus grand d’entre eux accumule justement les déboires, autant stratégiques qu’économiques. Pourquoi le suivre dans ses naufrages ? Il assène que « les perdants ont toujours tort », ce qui est généralement vrai mais le fait d’être présent dans une organisation essentiellement anglo-saxonne ne nous fera pas être plus écouté que de l’extérieur où, justement parce qu’elle était souvent discordante, la voix de la France avait un gros écho de l’autre côté de l’Atlantique. Je crains que noyé dans la masse, et même si deux commandements subalternes, à Lisbonne et à Norfolk, Virginie, lui étaient confiés à titre de remerciement ( après l’affront de celui de Naples ), le petit doigt que lèverait le représentant français ne pèserait pas lourd face à la forêt de mains des affidés. Je doute donc que la France sera « plus forte et plus influente ». Elle aura simplement perdu cette confiance des non-alignés en affichant un ralliement inconditionnel avec le « diable US », tel que le désigne en particulier le monde musulman.
Le président nous prédit aussi que c’est le seul moyen de relancer la construction européenne qui stagne. Les Américains, pas plus que les Chinois, futurs nouveaux maîtres du monde, ne veulent d’une Europe forte et puissante économiquement, encore moins unie militairement ( et on est loin du compte sans les Anglais et les Scandinaves ). Ils auront beau jeu de rappeler que tous les pays européens sont désormais sous la protection du parapluie otanien. Alors, à quoi bon dépenser des fonds pour une défense séparée et difficilement commandable ?
En résumé, je ne crois pas qu’on puisse dire que « notre rapprochement avec l’OTAN conforte l’indépendance nationale ». Le Grand Charles de Colombey doit se retourner dans sa tombe.
A l’inverse, sans doute demandera-t-on à ce revenant de ne plus rester seulement le 5ème contributeur financier de l’Alliance mais de faire un effort supplémentaire. Cet effort étant déjà fait en termes humains. Espérons que le jeu en vaut la chandelle et que les petits Gaulois ne soient pas un jour envoyés au combat, dans une nouvelle croisade atlantique, contre la volonté des Français eux-mêmes. « C’est un pari » aurait dit le président Sarkozy. Parfois, on les perd. Je souhaite de tout cœur que celui-ci soit gagnant. Wait and see !
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